Incarcération des personnes handicapées et aborigènes
Il existe une forte prévalence de personnes autochtones handicapées incarcérées de manière injuste et injustifiée en raison du système de justice pénale qui n’est pas correctement équipé pour soutenir les personnes handicapées, comme celles atteintes de lésions cérébrales ou du syndrome d’alcoolisme fœtal. Le NDIS n’est pas suffisamment impliqué dans les systèmes de santé et de logement des États/territoires pour aider de manière appropriée les personnes handicapées à vivre dans la communauté et à prévenir la récidive. Les personnes handicapées ont signalé que le système pénitentiaire les punissait en tant que personnes plutôt que de les aider à résoudre les problèmes liés à leur santé mentale et à leur handicap. [Illustration et texte de John Gilroy]
L’image représente la tête d’une personne racisée, un lame de couteau est plantée sur le côté gauche, sur laquelle il est inscrit « Stigma ». Une seringue est plantée sur son crâne en haut à droite, sur laquelle il est écrit « social control ». Une autre lame de couteau est plantée sur le côté droit de son crâne. Il est écrit sur cette lame: Racialableism (i.e. racial et capacitisme, capacité raciale). Plus bas est inscrit « We need NDIS too », NDIS signifie National Disability Insurance Scheme. En bas à droite est inscrit J. Gilroy. (source: University of sidney)
À propos de Global Disability Justice
(Justice globale des personnes handicapées)
Le travail analytique présenté sur ce site met en valeur le travail effectué dans les espaces universitaires et communautaires (Noirs et Autochtones) et reconnaît l’importance de parler de race (ou d’autochtonie) et de handicap ensemble plutôt que séparément, afin d’honorer et de représenter pleinement les expériences de ces personnes vivant à ces intersections, pour une discussion plus détaillée et une reconnaissance des personnes handicapées de couleur qui sont engagées dans ce travail depuis des années (Harriet Tubman Collective; 2018).
Ce site leur est redevable. Il s’appuie sur leur travail en matière de justice des personnes handicapées. Des personnes pour qui le lien entre la race, le handicap, les violences d’État et l’incarcération est une évidence. Le capacitisme/validisme, comme le racisme, sont des formes d’oppression structurelles. Cela signifie qu’elles sont souvent invisibles, en particulier par les personnes non concernées, mais aussi par le gaslighting social normalisé qui imprègne les cultures colonisées du monde entier.
La mobilité et les libertés dont nous disposons dans le Nord sont en fait dépendantes, ou interdépendantes du handicap des personnes du Sud qui effectuent principalement l’extraction des ressources pour maintenir les niveaux de consommation et la qualité de vie du Nord global.
Notre responsabilité est de reconnaître:
- les impacts persistants du colonialisme et de l’impérialisme dans la production de handicap et de déficience dans le Sud (qui est aussi liée et interdépendante à celle qui est produite dans le nord), la reproduction de la violence coloniale continue et du handicap qui y est associé.
- que la violence coloniale ne se limite pas à un passé lointain (c’est-à-dire le colonialisme) ; au lieu de cela, elle persiste sous forme de colonialité.
Le discours sur le handicap et le développement est ancré dans un point de vue épistémique du Nord et les racines coloniales de l’Empire, dans une obsession à désigner et à délimiter les différences humaines où l’utilisation d’un langage pour étiqueter et catégoriser le corps et l’esprit des autres sont liées à un état d’esprit colonial. Ces discours du Nord – eurocentriques – sur le handicap contrastent fortement avec cette nécessité de prévenir les handicaps et les génocides massifs dans les pays du Sud, ne serait-ce pour comprendre leur épistémologies complexes et analyser l’impact handicapant durable du colonialisme.
Ce site se concentrera sur les concepts autochtones de la différence non seulement pour faire avancer les approches et les discussions occidentales sur le handicap, mais aussi comme moyen de surmonter la prédilection du dialogue occidental pour les binaires hiérarchiques.
Chacun des théoriciens de la Disability Justice démontre pourquoi les discussions sur la suprématie blanche et l’oppression des personnes handicapées doivent être simultanées, car ces systèmes se renforcent et s’imbriquent les uns dans les autres.
L’objectif de ce site est de générer des connaissances qui informent et qui sont constamment liées à la pratique. Pour celà, le handicap est un lieu privilègié pour analyser la dynamique du libéralisme, de la colonialité, de l’impérialisme, de la suprématie blanche…
Il est impossible de démanteler la suprématie blanche sans faire progresser de manière significative la justice des personnes handicapées, et vice versa.
L’objectif de ce site est donc de:
- proposer des traductions de textes sur le handicap pour éclairer un point de vue du contexte mondial majoritaire.
- sensibiliser sur le lien entre les théories de l’abolition, les théories décoloniales, la justice des personnes handicapées, la justice sociale/climatique…
- fournir des ressources épistémiques – ancrées dans la subjectivité marginalisée des personnes handicapées – pour comprendre la colonialité comme un processus de déshumanisation, incapacitant, handicapant (principale implication pour les projets décoloniaux).
- résister aux forces culturelles et écologiques qui transforment cette différence, cette altérité… en détresse chronique.
- fournir des informations cruciales pour comprendre et démanteler les barrières qui bloquent la réciprocité, l’interdépendance, la relationalité (le changement climatique est un problème relationnel; O’Brien, 2020).
- remettre en question la domination épistémologique des études occidentales sur le handicap dans les organismes et les contextes du Sud soutenant un « néo-impérialisme académique ». Le « handicap » est concentré dans le Sud, mais les concepts, les connaissances, la voix, les épistémologies du Sud et leur complexité sont rarement pris en compte et effacées.
- fournir des outils pour faire face à cette résistance raciste qui résiste à la guérison de la colonisation tout en se positionnant comme des « libérateurs » des communautés en marge.
- proposer des outils pour réfléchir à ce qui contribue à masquer la responsabilité du colonialisme/colonialité et de la suprématie blanche dans la crise écologique planétaire.
- comprendre le lien inextricable entre la colonialité et l’extractivisme, le système économique hégémonique actuel qui favorise l’extraction illimitée de ressources naturelles, conduisant à la destruction écologique.
- nous appuyer sur les perspectives des CDS (Critical Disability Studies), sur l’expérience des points de vue épistémiques « précaires » pour tourner le prisme analytique et problématiser les constructions dominantes de capacité associées à cet individualisme néolibéral. Les perspectives GDS (Global Disability Studies) trouvent leur fondement épistémique dans les communautés racialement subordonnées, une source constante de points de vue épistémiques qui permettant de contester cette « insupportable blancheur ».
- identifier et discuter de la culture de la suprématie blanche (WSC) qui est omniprésente dans nos espaces organisationnels, « progressistes ».
- affirmer que la WSC, le racisme et le validisme sont des formes d’oppression profondément intersectionnelles.
- démanteler et désapprendre les pratiques et les mentalités coloniales qui gravitent autour des connaissances, du leadership, des privilèges, du pouvoir et des corps/esprits coloniaux blancs.
- explorer les façons dont les 10 principes de la justice des personnes handicapées pourraient servir à créer des normes, des valeurs et des pratiques comportementales contre-culturelles de soutien nécessaires pour créer les conditions de guérison de la culture de la suprématie blanche.
- développer une stratégie décoloniale qui consiste à normaliser ou à rendre défendables les façons d’être associé aux expériences chroniques de handicap que les perspectives hégémoniques décrivent comme pathologiques ou sous-optimales.
- apprécier l’expérience du handicap en dehors de cet esprit colonial qui consiste à juger cette manière d’être négative ou inférieure qui nécessite une intervention perpétuelle, mais plutôt comme un mode d’existence humaine viable et précieux, une expression essentielle de la diversité humaine.
- reconceptualiser le handicap en tant qu’expérience de groupe minoritaire et permettre le développement d’une identité sociale politisée autour de laquelle les personnes handicapées peuvent organiser leur résistance à l’oppression sociétale. Ces positions marginalisées ont une capacité distincte à révéler les constructions individualistes néolibérales de la personne et de l’action qui sont tenues pour acquises et non durables.
- localiser la source de l’oppression du handicap dans l’esprit biaisé d’individus libéraux ignorants et/ou insensibles.
- dénaturaliser les manières d’être individualistes néolibérales, considérées comme allant de soi, ce à quoi les perspectives des CDS (études critiques du handicap) contribuent.
- suggèrer des réflexions pour contrer les préjugés individuels afin d’éliminer toutes les barrières injustes, de libérer les personnes défavorisées (handicapées) afin qu’elles puissent réaliser le potentiel qu’elles pourraient expérimenter au sein d’une société plus juste.
- mettre en œuvre une pédagogie de réduction des méfaits (indissociable de la pratique de la responsabilisation) ou une approche pédagogique pour comprendre la violence continue de la blancheur, etc…
Le monde du handicap est si vaste et complexe qu’il permet un potentiel passionnant de reflexion et d’imagination. Ce cadre critique et intersectionnel de justice des personnes handicapées, avancé par des théoriciens et des bâtisseurs de mouvements tels que Patty Berne (Sins Invalid, 2016), Mia Mingus (2014, 2017), Leah Lakshmi Piepzna-Samarasinha (2018) et d’autres… peut interrompre à jamais votre approche de l’apprentissage, votre réflexion ou votre vie en général… les chercheurs en études critiques sur le handicap considèrent le handicap comme « l’espace à partir duquel réfléchir à une multitude de questions politiques, théoriques et pratiques »
La justice des personnes handicapées (Disability Justice) reconnaît que:
« le capacitisme, associé à la suprématie blanche, soutenu par le capitalisme et souligné par l’hétéropatriarcat, a rendu invalide la grande majorité du monde » (Sins Invalid 2015). Les interprétations dominantes du handicap promouvant l’oppression des personnes handicapées sont historiquement liées à la suprématie blanche, au colonialisme de peuplement, au capitalisme et à l’hétéropatriarcat (Hedva, 2016 ; Mingus, 2011a ; Sins Invalid, 2016).
« une perspective intersectionnelle nous aide à comprendre que le capacitisme, l’anti-noirceur mondiale, le racisme et la culture de la suprématie blanche sont « mutuellement inclusifs et mutuellement dépendants » les uns des autres et de toute autre forme d’oppression. Le racisme et la culture de la suprématie blanche ne peuvent exister sans capacitisme, et le capacitisme dépend du racisme anti-noir » (An-namma et al. 2013, 2018 ; Chin 2021 ; Dolmage 2011 ; Erevelles 2014 ; Lewis 2022, voir pages 6 et 24 ; Schalk 2022 ; Taylor 2015).
Les idées construites de normalité, d’intelligence et d’excellence sont profondément enracinées dans l’anti-noirceur, l’eugénisme et le capitalisme. Paty Berne soutient que l’oppression des personnes handicapées est liée au « projet colonial massif d’expansion de l’Europe occidentale » (Sins Invalid, 2016, p. 18).
Le capacitisme est un système de pouvoir fondamental qui « prépare le terrain » pour de nombreux autres systèmes, structures et pratiques de domination, tels que l’eugénisme, le racisme scientifique, le meurtre et l’esclavage. (Mia Mingus)
Le mouvement vers la justice sociale nécessite le travail de développement d’une conscience libératrice enracinée dans les valeurs d’interdépendance, d’alliance, d’appartenance, de responsabilité et de solidarité décoloniale (voir Blessett et al. 2019 ; Brown 2017, 2021 ; Gooden 2014 ; Guy et McCandless 2020 ; Harro 2018a, 2018b ; Kluttz et al. 2020 ; Love 2018 ; Menakem 2017 ; Mingus 2010, 2018, 2019a, 2019b, 2019c, 2022 ; Morris 2017 ; Piepz-na-Samarasinha 2018).
Il ne peut y a voir de justice locale et globale sans se recentrer sur les plus impactéEs.
Ces positions marginalisées ont une capacité distincte à révéler les constructions individualistes néolibérales de la personne et de l’action qui sont tenues pour acquises par la science psychologique hégémonique et qui persistent dans les articulations dominantes des Disability Studies.
Une optique CDS aide à révéler comment les investissements dans les capacités non seulement relèguent les corps non normés (racisés/handicapés) à la marge, mais conduisent également les gens plus généralement à poursuivre des modes normatifs (intenables) fondés sur des niveaux élevés de consommation de ressources.
Les perspectives des Critical Disabiliy Studies contribuent à dénaturaliser les manières d’être individualistes néolibérales, considérées comme allant de soi, qui éclairent les prescriptions de la science psychologique.
Pratiquer une pédagogie intersectionnelle, antiraciste et décoloniale de justice des personnes handicapées implique de remettre en question les hypothèses fondamentales qui guident les études et les pédagogies sur le handicap afin de centrer les personnes de couleur et de créer des opportunités pour résister à la suprématie blanche et au colonialisme de peuplement tels qu’ils se manifestent dans les espaces d’apprentissage et les établissements d’enseignement.
Une justice globale des personnes handicapées permet de répondre à l’appel de Frantz Fanon pour de nouveaux concepts sur lesquels construire une psychologie de l’humanité globale. Comme le dit Patricia Berne à propos de la formation du paradigme de justice des personnes handicapées (qui critique les cadres libéraux en matière de droits):
« un cadre de justice des personnes handicapées comprend que tous les corps sont uniques et essentiels, que tous les corps ont des forces et des besoins qui doivent être satisfaits… Nous sommes dans un système global incompatible avec la vie. Il n’y a aucun moyen d’arrêter un seul engrenage en mouvement – nous devons démanteler cette machine. » (Patty Berne)
Une interprétation des 10 principes de la justice des personnes handicapées ici
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